Madame la Présidente, je veux revenir aujourd’hui sur la question que j’ai posée le 25 mars. Elle concernait la position du gouvernement fédéral sur les poursuites intentées par des fonctionnaires noirs qui se sont courageusement manifestés pour dénoncer les actes répréhensibles et la discrimination systémique dont ils sont victimes depuis le début de leur carrière.
Au cours des semaines qui se sont écoulées depuis, nous avons appris que, au fil des ans, certains fonctionnaires se sont fait proposer de l’argent en échange de leur silence et du retrait de plaintes de discrimination raciale. Il n’est jamais facile de dénoncer le racisme. Cela devrait être inconfortable. Nous ne pouvons pas demander aux gens d’ignorer les injustices qu’ils ont subies et de dissimuler leurs problèmes. C’est du détournement cognitif. Nous ne pouvons pas demander aux gens de garder le silence, et nous devons éviter d’avoir un silence complice.
Mon but ce soir n’est pas de jeter le blâme sur d’autres ou de les pointer du doigt. Je souhaite plutôt mieux comprendre ce que le gouvernement fait exactement pour combattre le racisme systémique. Je veux l’aider dans ses démarches. Je désire attirer l’attention sur les incroyables personnes dans ma circonscription et dans les Maritimes qui changent la donne et qui inspirent la prise de mesures concrètes dans ma collectivité.
Nous nous rendons soudainement compte que le Canada a un problème de racisme. Pourtant, cela fait bien longtemps que les gens de couleur, les Noirs et les Autochtones nous disent que notre société, nos institutions, nos comportements collectifs et nos préjugés leur causent continuellement du tort, et parfois même leur mort.
Les gestes symboliques que le gouvernement a posés n’ont rien donné jusqu’à maintenant. Un grand titre que j’ai vu dans les dernières semaines disait d’ailleurs ceci: « Des agents autochtones quittent la GRC — d’anciens agents dénoncent le racisme qui sévit dans les rangs. »
Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse rechignait à l’idée de payer davantage d’agents de la GRC pendant le conflit sur les pêches, alors que des pêcheurs micmacs avaient subi des assauts et vu leurs biens incendiés et leurs prises détruites. Les stratégies adoptées par l’armée pour promouvoir la diversité et l’inclusion n’ont pas porté de fruit. Les travailleurs étrangers temporaires — qui travaillent dans des champs d’un bout à l’autre du pays et contribuent à assurer la souveraineté alimentaire du Canada — œuvrent dans des conditions dangereuses et insalubres et vivent dans des pièces surpeuplées. Certains d’entre eux couchent sur le plancher.
Les gestes symboliques ne règlent pas les causes profondes du problème. Le Canada doit poser des gestes spécifiques et stratégiques pour réparer les torts causés, et il doit avoir des objectifs mesurables. Je suis certaine que notre collègue mentionnera la mise en place du Secrétariat de lutte contre le racisme. Je me réjouis de la création de ce secteur et j’apprécie la ministre et son engagement. Cela dit, il serait grand temps de parler aux Canadiens des démarches concrètes entreprises pour démanteler les systèmes d’oppression. Je soutiens qu’il devrait y avoir un ministère entier dédié à la lutte contre le racisme.
De nombreux Canadiens n’ont aucune notion de ce qu’est le racisme, de son fonctionnement et de ce qui lui donne du pouvoir. Certains doutent encore de son existence et hésitent à faire des comparaisons avec nos voisins du Sud. Nos enfants doivent apprendre la pensée critique pour poser des questions difficiles, pour remettre en question les discours et pour déconstruire les mensonges qui soutiennent la suprématie blanche.
On nous dit que le changement se produit lentement et que les choses prennent du temps. Je pourrais peut-être nous suggérer d’écouter les Noirs, qui nous montrent la voie à suivre en ce moment. Le recours collectif vise des solutions à long terme pour remédier définitivement au racisme et à la discrimination systémiques au sein de la fonction publique canadienne, ce qui aurait à coup sûr un effet d’entraînement dans l’ensemble des collectivités. Parmi les dommages cités, on retrouve le refus injustifié de promotion, l’infliction intentionnelle de souffrances psychologiques, le congédiement déguisé, le licenciement injustifié et la négligence, ainsi que la violation du droit du travail, des droits de la personne et de la Charte.
En cherchant à instaurer l’égalité en milieu de travail, le Canada a omis d’éliminer les désavantages subis dans le domaine de l’emploi par les Canadiens noirs. Le Secrétariat de lutte contre le racisme s’engagera-t-il à corriger ces injustices?