Madame la Présidente, je profite du débat d’ajournement pour revenir sur une question que j’avais posée le 17 novembre pendant la période des questions.
En tant que députée, je réfléchis souvent à ce que signifie servir son pays. La base militaire de Gagetown se trouve dans ma circonscription, Fredericton, et c’est avec une grande fierté que je représente beaucoup de gens qui servent, eux aussi, le Canada, à titre de membres actuels ou retraités des Forces armées canadiennes.
Il existe un pacte moral, social, juridique et fiduciaire distinct entre le Canada et les membres actifs et retraités des Forces armées canadiennes. J’interviens ce soir animée par la conviction que le gouvernement ne satisfait pas à ses obligations envers les personnes qui se sont sacrifiées et ont sacrifié leur santé et leur bien-être pour servir le pays.
Je souhaite attirer l’attention du secrétaire parlementaire sur un groupe de citoyens courageux, vaillants et motivés de ma circonscription qui ont pris pour nom « Brats In The Battlefield ». Ce sont des vétérans, des enfants de vétérans et des civils qui vivent à proximité de la base. Ils sont victimes, eux aussi, des pesticides et des herbicides qui ont été utilisés sur la base de Gagetown et se sont accumulés pendant des décennies et ils cherchent des réponses. Ils ont déjà perdu beaucoup trop d’êtres chers. Bon nombre d’entre eux luttent maintenant pour leur santé parce qu’ils sont confrontés à des cancers ou à d’autres maladies qui peuvent être liées à une exposition à des produits chimiques. Ils méritent que justice soit faite.
Une enquête publique indépendante pour connaître la nature et la quantité exactes du produit utilisé aiderait à trouver les réponses aux questions qui ont été soulevées. Dans une réponse à leur pétition, le gouvernement a confirmé que toutes les règles fédérales et provinciales ont été suivies à l’époque, sauf dans de rares cas, mais cette réponse ne suffit pas; elle est même scandaleuse. Les politiques ont évolué au fil du temps parce que nous en savons maintenant davantage sur ces produits. Nous devons nous fonder sur les connaissances scientifiques actuelles pour évaluer les décisions qui ont été prises dans les 70 dernières années afin que les gens sachent avec certitude à quoi ils ont été exposés et quels sont les risques pour leur santé.
Si le gouvernement veut prendre son rôle et sa responsabilité au sérieux, alors il devrait mettre sur pied une commission d’enquête publique entièrement indépendante qui fera des recommandations en fonction des pesticides qui ont été utilisés à la base des Forces canadiennes de Gagetown et dans les collectivités environnantes à partir des années 1950 jusqu’à maintenant, soit bien au-delà de la période de deux ans qui a été étudiée précédemment.
Une enquête a déjà été commandée, et une évaluation des risques pour la santé a ensuite été menée par l’industrie des produits chimiques elle-même. Il n’est donc pas surprenant que les personnes affectées ne soient guère rassurées par les conclusions de ces rapports. Par ailleurs, la Loi sur les enquêtes dit expressément qu’il faut nommer un commissaire indépendant pour faire enquête, ce qui n’a jamais été fait.
Le mandat d’Anciens combattants Canada est de veiller au bien-être des vétérans et de leur famille. Ce dont j’ai parlé fait manifestement partie de ce mandat. Les membres de ce groupe courageux se sentent non seulement abandonnés, ils se sentent aussi piétinés et écartés du processus démocratique.
Puisque je suis moi-même née et que j’ai grandi à Oromocto, je sais que la base fait partie de notre identité. C’est le cœur même de l’économie de la collectivité. Ceux qui y ont servi et leur famille méritent que justice soit faite. Je demande au gouvernement de faire ce qui s’impose et d’examiner bien comme il faut ce qui est arrivé à la base de Gagetown, comme l’emploi continu d’herbicides et de pesticides et les risques qu’on est prêt à prendre avec la santé humaine.
Je ne peux qu’espérer que ces Canadiens vivront assez longtemps pour recevoir la reconnaissance qu’ils méritent et pour retrouver la paix, dans l’espoir que cela ne se reproduira plus jamais.
Madame la Présidente, c’est une chose de se souvenir des sacrifices des vétérans, mais c’en est une autre de répondre aux besoins urgents qu’ils ont actuellement.
Si je puis me permettre, voici une liste des maladies présumément liées à l’exposition à l’agent Orange, dont certains vétérans canadiens ou membres de leur famille sont atteints: la leucémie lymphoïde chronique, le sarcome des tissus mous, le lymphome non hodgkinien, la maladie de Hodgkin, la chloracné, le cancer des voies respiratoires, le cancer de la prostate, le myélome multiple, la neuropathie périphérique transitoire d’apparition précoce, la porphyrie cutanée tardive, le diabète de type 2 et le spina-bifida chez les enfants des personnes exposées.
De l’agent Blanc et de l’agent Pourpre ont aussi été pulvérisés dans ma collectivité, ainsi que du glyphosate et du DDT. Les citoyens se sont fait dire que ces produits chimiques étaient presque assez sûrs pour être bus. Des travailleurs ont enlevé des broussailles à mains nues tout de suite après une pulvérisation alors que des enfants s’amusaient dans les nuages de fumée derrière les camions de pulvérisation. Les entreprises contractantes, qui voulaient économiser quelques dollars, ont tourné les coins ronds et augmenté la concentration des produits chimiques. Maintenant, ce sont les citoyens qui en paient le prix.
Le gouvernement fera-t-il ce qui s’impose? S’acquittera-t-il de son devoir de prendre soin des vétérans et de leur famille? Entreprendra-t-il…